Auteur

Annie Déan

Année de publication

2004

Cet article est paru dans
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Si un enfant n'est pas éduqué aux légitimes frustrations de la vie, et s'il n'a pu bénéficier de relations nourrissantes, il risque d'utiliser la violence comme moyen d'expression.

Si un enfant n'est pas éduqué aux légitimes frustrations de la vie, et s'il n'a pu bénéficier de relations nourrissantes, il risque d'utiliser la violence comme moyen d'expression.

Il y a cinquante ans, la question suivante a été posée à un garçon de 8 ans : "Qui aimes-tu le mieux, ton papa ou ta maman ?". Il répondit "C'est pareil. maman tape plus souvent, mais papa tape plus dur". Sa maman croyait, je cite, que "si on ne marque pas son autorité sur le corps des enfants, ils ne souviennnent pas de ce qu'on leur dit". Son intention était de donner des limites afin de bien "élever" ses enfants, et la crainte était une arme qu'elle pensait efficace. Il y a cinquante ans, cela paraissait normal. Cet autoritarisme était même étayé par les pouvoirs en place et par des croyances : l'enfant devant être dressé, étant facilement considéré comme une mauvaise graine à corriger. Ce monde était encore chez nous celui d'une morale unique : la vérité est incrite dans la religion, le parti ou la tradition, et l'objectif de l'éducation est d'apprendre à s'y conformer, à s'y soumettre. Le "rouleau compresseur" s'imposait à tous, chacun à sa place ! La transmission à opérer était claire. Il n'y avait pas ce que l'on nomme à présent la crise de l'éducation. La démocratie faisant des progrès, il y a eu disparition de cette référence morale unique. Il n'y a plus de certitudes, mais une multitude de vérités. Chacun est légitimé à revendiquer une conception particulière du monde, de la réussite, de la vie affective, du vivre-ensemble...

Nous entendons parfois dire qu'il n'y a plus de repères. Peut-être est-il plus juste d'affirmer qu'il y a une multitude de repères, ceux-ci entrant parfois en concurrence les uns avec les autres. Mais qu'on ne s'y trompe pas : dans les régimes totalitaires, il n'y a pas de crise de l'éducation ! La démocratie est jeune encore, et concernant l'éducation, elle nous contraint à penser par nous-mêmes. Un deuxième élément fragilise les adultes : l'accèlèration de l'histoire due aux progrès scientifiques et technologiques. Quelques exemples : "60% des enfants qui entrent en sixième cette année exerceront un métier qui n'existe pas encore; 90% des brevets en usage dans l'industrie ont été déposés depuis moins de cinq ans; il se passe plus de choses aujourd'hui dans un écart de cinq ans - donc à l'intérieur d'une fratrie - qu'il ne s'en passait entre deux générations il y a cent ans, et entre cinq ou six générations au XIXème siècle1", vertigineuse accélération qui complique et bouscule singulièrement la tâche éducative.

De la difficulté à dire "non"

Dans certains domaines, il y a même inversion de transmission, les enfants devenant les "maîtres" de leurs parents, par exemple en informatique. C'est à l'intérieur de ce contexte que nombre de parents ou d'adultes trouvent des difficultés à dire "non" à leurs enfants. Comment en effet être sûr des exigences et des limites que l'on impose si tout s'effondre, disparaît ou tangue ? Les enfants ont le mérite de nous obliger à penser l'avenir que nous voulons pour eux, à repenser l'acte éducatif.

Dire "non", c'est poser des limites structurantes et fiables qui "circuitent" le désir de l'enfant et entre lesquelles ils pourra exercer sa pensée, sa créativité, explorer le monde en toute sécurité, se confronter à la réalité de la vie sociale et apprendre à composer avec les inévitables frustrations. Une bonne limite, c'est : tout est permis, sauf ce qui est défendu ! Cette limite doit être posée dans l'intérêt de l'enfant. Dans cet espace protégé, il pourra grandir, c'est à dire intégrer la Loi, pour vivre avec les autres mais aussi accéder à la parole, sa parole, et trouver du sens, c'est à dire un espace qui lui convienne : trop serré, il risque d'étouffer, trop vaste, il risque de se perdre.

Il est intéressant de remarquer au passage que le terme "non-violence" forgé par Gandhi exprime quelque chose de fondamental en lien avec le sujet de cet article. Entrer dans une démarche non-violent, c'est avant tout dire "non" à la violence d'où qu'elle vienne et donc, de fait, vouloir trouver des moyens d'action étrangers à la logique de la violence. En d'autres termes, ne peut-on pas espérer que les traces du "non" entendu par l'être éduqué lui permettront plus tard de dire le "non" à la violence, première étape pour découvrir ensuite les richesses d'une démarche pleinement citoyenne dans la vie sociale et politique ?

S'enrichir de la différence des autres

Nous sommes tous différents. Il n'existe pas deux personnes identiques sur terre. Et c'est bien ainsi ! Cette confrontation à la différence est une condition pour se découvrir soi-même et s'enrichir. Mais c'est aussi source d'incompréhension, de conflit et de souffrances.

Nous sommes des êtres de relation. Comme le cite Isabelle Filliozat : "la seconde folie de Frédéric II (roi de Prusse, 1712-1786) fut qu'il voulut savoir quel genre de langage et quelle manière de parler auraient les enfants s'ils n'avaient parlé à personne auparavant. Il ordonna donc aux nourrices et aux nurses d'allaiter les enfants, de les baigner, de les laver mais de ne babiller avec eux en aucune façon... Tous les enfants moururent. Ils ne pouvaient vivre sans les caresses, les visages joyeux et les mots d'amour de leur nourrice2"Ce besoin fondamental de reconnaissance a plusieurs conséquences : l'enfant va tout faire pour garder la relation, et il se contentera, faute de mieux, d'une relation douloureuse, voire toxique pour ne pas mourir. Mieux vaut des "gifles et des coups" que "rien", car cela permet de survivre, même au prix de la souffrance. D'autre part, ce besoin met l'accent sur l'importance du regard et de la qualité du lien pour se construire. La rencontre avec l'autre va bâtir ou détruire la confiance en soi, et construire ou pervertir la relation à l'autre. Nous savons tous à quel point un regard méprisant peut être destructeur.

Nous avons, les uns et les autres, des besoins et des désirs; il convient de les différencier. Le besoin doit être satisfait, ou à tout le moins entendu (amour, sécurité, reconnaissance, compréhension,autonomie, repères...), tandis que le désir peut être frustré. Le parent doit satisfaire le besoin d'avoir des chaussures, mais pas nécessairement le désir qu'elles soient "de marque". Il arrive que les besoins de l'enfant convergent avec ceux de l'adulte : on a tous en même temps besoin de faire une pause, c'est facile, ou bien on veut ensemble le même objet et pouvons devenir rivaux... Il arrive aussi que les désirs ou les besoins divergent : l'adulte a besoin de calme, de solitude, et l'enfant réclame un moment privilégié, un câlin. Pour vivre ensemble, il est nécessaire d'apprendre à composer avec tout cela. Toute vie collective est une recherche constante d'accord pour que chacun se sente reconnu et respecté. C'est pourquoi, toutes les relations sont situées dans un cadre, qui précise le statut, les droits et responsabilités de chacun. Éduquer un enfant ("éduquer" de ex d'acéré, conduire dehors), ce sera de fait lui permettre de se construire pour qu'il vive dans la société qui sera la sienne. C'est le conduire vers son autonomie, c'est à dire être à la fois capable de responsabilité (reconnaître ses besoins, gérer les conflits et être en empathie avec autrui), et capacité de liberté - faire des choix, être soi-même et continuer à se construire en l'absence de l'autre, et pouvoir rester soi-même sans s'effondrer en présence de l'autre. Deux pistes sont explorés ici pour y parvenir : cultiver la confiance en soi et en l'autre, et intégrer le cadre.

Sans cadre et sans règle, la vie humaine est impossible

Le cadre, c'est en quelque sorte "la règle du jeu". Pour jouer à un jeu de société, que j'espère coopératif, il faut en connaître les règles et que chacun s'engage à les respecter, sinon, ou bien il devient impossible de jouer, ou bien un arbitre sanctionne la transgression, ou encore les joueurs se mettent d'accord pour faire évoluer la règle. Sans règle, il n'y a pas de jeu possible. Celle-ci doit être annoncée, commentée et garantie. Celui qui ne connait pas la règle, ou ne la respecte pas, ne peut pas jouer. Et peut-être même va-t-il tenter de saboter le jeu des autres s'il se sent exclu ou rejeté ! En revanche, celui qui a intégré la règle peut ensuite courir le monde où il rencontrera d'autres joueurs et d'autres jeux, qui du coup lui seront accessibles. des possibles lui sont ouverts.

Il y a plusieurs niveaux de cadre : la Loi, la règle et le contrat. La Loi s'adresse à chacun, adulte comme enfant et doit être appliquée par tous. Elle a deux étymologies. Premièrement, léger ou l'ex signifie ce que chacun reçoit en héritage - cela met en lumière la nécessité d'une transmission par les adultes de la Loi. Deuxièmement, l'ignare induit lm'impératif de "créer du lien", et met donc en exergue sa nécessité pour entrer en relation avec les autres. La Loi peut se résumer en deux grandes directions : ne pas nuire à l'autre et ne pas abîmer le bien commun. La règle s'inscrit à l'intérieur de la Loi, en cohérence avec elle et, en quelque sorte, précise la Loi dans les lieux particuliers. La règle peut être, ou ne pas être négociable. Elle peut changer suivant les maisons, c'est à l'adulte d'identifier ce qui pour lui n'est pas négociable et qui dépend de ses valeurs, besoins et limites personnels. Il est cependant important d'identifier les raisons pour lesquelles une règle devient impérative afin de ne pas laisser croire à l'enfant que l'arbitraire personnel est au-dessus de la Loi. Comme la Loi, la règle s'applique à tous. Le contrat est toujours négociable et doit indiquer les droits et responsabilités de chacune des parties. Bien sûr, l'espace de négociation grandit avec l'enfant, puis l'adolescent. 

La loi, la règle, le contrat : pourquoi ? Ils ont trois fonctions. D'abord, et c'est essentiel, ils ont une fonction de protection, de sécurité. Cette protection sera d'autant plus efficace que chacun habite son statut. Les parents ne sont pas à la même place que les enfants et doivent sur-veiller, c'est à dire "veiller sur" leur enfant. De même, il paraît évident que tout enfant soit assuré qu'il ne sera pas agressé dans une cour d'école, ou bien il saura à qui s'adresser pour aider à réguler son conflit s'il n'y parvient pas seul. D'autre part, pour grandir, l'enfant a besoin d'avoir un ou des adultes auxquels s'identifier. Si ceux-ci ont peur d'être adultes ou de prendre leurs responsabilités en tant que tels, l'enfant aura plus de difficultés à évoluer. Il risque de stagner ou d'entrer en rivalité avec eux, voire de chercher ailleurs des modèles d'identification. La sécurité sera également plus grande si loi et règle sont en cohérence. C'est comme le code de la route : il est quand même plus confortable et rassurant que nous apprenions tous le même sur un territoire donné ! Alors, les règles de la maison préparent-elles l'enfant à se sentir à l'aise quand il va explorer d'autres lieux ? 

L'apprentissage nécessaire à la frustration

La deuxième fonction de la Loi est plus psychologique. Elle est "ouverture au monde", sortie de la symbiose avec la mère, exigence de séparation pour que "chaque un" devienne lui-même en se confrontant aux autres et à la réalité. Elle met une limite au désir normal de toute-puissance du tout petit. Elle lui apprend qu'il ne peut tout avoir et tout de suite... ! C'est la découverte graduelle qu'il n'est pas le centre du monde, que sa mère, son père, ou sa maîtresse peut aimer ailleurs, s'occuper d'autres enfants sans pour autant l'abandonner. C'est l'apprentissage progressif de la tolérance à la frustration et du respect du territoire des autres : apprendre à attendre, à différer le plaisir, à surseoir à ses impulsions...

Deux obstacles peuvent entraver cette découverte. d'abord ne pas avoir rencontré de limites; l'enfant à qui on ne dit jamais "non" peut devenir un tyran. Pour lui, l'"autre" reste une source de satisfaction. Il risque aussi l'enfermement dans la solitude. L'autre obstacle est d'un autre ordre : c'est la souffrance conséquente à la trahison, quand les promesses ne sont pas tenues, quand l'enfant subit le mensonge, l'incohérence ou la violence. Alors s'installe "un tiens vaut mieux que deux tu l'auras" pour celui qui a perdu toute confiance en l'autre et en lui-même. La seule chose qui reste sûre, c'est l'immédiateté qui est une façon de lutter contre son impuissance. La troisième fonction, c'est de donner du sens. Quel sens donnons-nous aux règles que nous imposons, aux lois que nous transmettons ? Que disons-nous ? Que faisons-nous ? Quel sens peut trouver un enfant à qui nous disons de ne pas frapper tout en lui administrant une gifle ou une fessée ? Les enfants nous regardent vivre et agir et cherchent le sens dans et au-delà de nos mots. Quelles valeurs transmettons-nous à travers nos actes et notre façon de poser les interdits ? "Tu ne tapes pas ton frère parce que tu vas voir ce qui va t'arriver !" Ou "Tu ne tapes pas ton frère parce que cela fait mal et que c'est interdit !".

A quoi réagissons-nous le plus : quand l'enfant a sali son pantalon, ou quand il insulte un copain ? Par ailleurs, le sens annoncé doit se réaliser pour structurer l'enfant : "Attends ton tour pour parler" mais lui donnons-nous effectivement la parole après cette promesse ?

Entendre les émotions

Poser le cadre ne suffit pas, l'enfant a aussi besoin d'être écouté, compris dans le plus profond respect. Le bébé pense avec son corps. S'il a mal, la vie n'est pas bonne, s'il est défendu, la vie mérite d'être vécue. s'il expérimente beaucoup plus de situations agréables que d'événements douloureux, s'installera un sentiment de confiance. Il "pense" avec son corps et a besoin d'être confirmé par un adulte, qui interprète et mette des mots sur son ressenti émotionnel. Les tout-petits ne peuvent se passer du langage affectif qui donne sens à leur vie. Ils ont besoin d'être confirmés dans leur réalité, avec empathie, et, petit à petit, ils emploieront leurs propres mots. Lorsque nous manquons de mots pour dire ce que nous ressentons, le corps prend le relais, les tensions intérieures s'installent, ou bien nous agressons les autres avec violence. Moins nous avons de mots à notre disposition, plus nous risquons de passer à l'acte, ou de développer de multiples symptômes, ou "maux".

Accueillir et entendre les désirs, les besoins et les émotions, est difficile. Nous n'avons pas appris à le faire, car nous-mêmes n'avons pas forcément été écoutés, et les émotions de l'enfant font souvent remonter notre angoisse et nos peurs d'enfant. alors nous censurons pour nous protéger. Il n'est pas rare d'entendre un adulte dire à un enfant : "Mais non, tu n'as pas mal !", alors qu'il vient de tomber; ou "Tu ne vas quand même pas pleurer pour çà", alors qu'il vient de perdre un jouet ou d'être "traité". Nous ne supporterions pas cela pour nous. Qu'est-ce qui nous fait croire que cela fait moins mal à une enfant ?


S'élever à la hauteur des enfants

Vous dîtes : c'est fatigant de fréquenter les enfants. Vous avez raison. Vous ajoutez : parce qu'il faut se mettre à leur niveau, se baisser, s'incliner, se courber, se faire petit. Là, vous avez tort. Ce n'est pas cela qui fatigue le plus. C'est plutôt d'être obligé de s'élever jusqu'à la hauteur de leurs sentiments. De s'étirer, de s'allonger, de se hisser sur la pointe des pieds. Pour ne pas les blesser.

Januz Korsazk


L'enfant qui tombe et égratigne a besoin d'être entendu dans sa douleur. Certes, il faut soigner la blessure physique, mais ce qui compte le plus à ce moment-là, c'est d'entendre ce qu'il ressent. Écouter n'est pas synonyme d'approuver. Écouter, c'est donner à l'autre de la reconnaissance, de l'attention, c'est lui permettre de mettre des mots sur ce qu'il ressent afin de se comprendre et de gagner en autonomie. Écouter un enfant, c'est lui permettre d'apprendre à apprivoiser ses émotions, gagner en confiance et préserver son intégrité. Mais combien c'est souvent difficile d'accueillir les larmes ou la colère d'un enfant quand d'autres adultes nous entourent : ne sommes-nous pas parfois plus préoccupés par notre image, et de ce fait empêchés d'écouter les besoins de l'enfant ? L'enfant aussi dit "non", et il est intéressant de chercher à quoi il dit "oui" derrière son refus. Aurélie, un an, fait une colère et jette son assiette par terre avec son contenu. Elle retrouve gaieté et appétit dès que sa maman lui propose de tenir elle-même sa cuillère pour manger, elle voulait seulement manger comme une grande, mais n'avait pas de mots pour exprimer son désir.

Dans une maison d'enfants à caractère social, deux adolescentes discutent : "T'as fugué ? - Ouais... - t'as été punie ? - Ouais... - T'as de la chance, moi il y a deux ans, j'ai fugué, on ne m'a rien dit, on s'en fout de moi !" Tout enfant va transgresser les règles posées, c'est normal. Elle ont pour fonction de l'aider à se confronter à la réalité. Aussi, à travers sa transgression, l'enfant pose deux questions : l'une à la règle : "Est-ce que çà marche ? Que va-t-il se passer si je passe la limite ? Quel sens a-t-elle ?" L'autre question s'adresse au garant de la règle : "As-tu dit vrai  ? Puis-je te faire confiance ? Es-tu suffisamment solide pour que je puisse m'appuyer sur toi pour avancer ? Que vas-tu me dire ? Que vas-tu répondre ?" Et la question fondamentale : "Qui suis-je pour toi ? M'aimes-tu ?" Il est nécessaire de lui donner une réponse s'il transgresse, s'il "dépasse les limites".

La sanction

La sanction révèle le sens véritable que nous donnons à la règle. Elle ambitionne à la fois de réparer la relation à la victime, de donner du sens à la règle ou la loi transgressée, quitte à la faire évoluer pour l'améliorer, et de permettre au transgresseur de retrouver confiance en lui et en l'autre. La transgression exclut de la communauté, la sanction a pour objectif de réintégrer le transgresseur. Il est nécessaire pour cela de différencier le plus clairement possible la personne de l'enfant et son acte. La sanction est réponse à un acte posé par l'enfant, et affirmation du respect de sa personne. L'enfant, comme nous a besoin d'un soutien inconditionnel à sa personne, mais ses actes peuvent être évalués. car dire "non", en posant des interdits structurants, c'est dans le temps dire : "Oui, tu peux vivre, être toi-même et grandir pour naître à toi-même, aux autres et au monde, de façon singulière." Il est temps d'en finir avec les humiliations, les exclusions, les jugements, les coups et autres brimades ! L'enfant est aimable tel qu'il est, il n'a rien à "faire" pour cela, ce n'est pas du même ordre. L'amour est inconditionnel.

"Il ferait n'importe quoi pour se faire remarquer", dit une enseignante d'un enfant au comportement dérangeant. Elle a sans doute raison. Il a besoin d'être reconnu, pris en compte, et n'a pas trouvé d'autre moyen pour capter l'attention de l'adulte. L'enfant apprend ce qu'on lui fait. Plus il recevra d'amitié, de tendresse, d'amour, de confiance et plus il cultivera ce qui aura été semé, malgré nos doutes, nos limites et nos incohérences. Il se construit d'ailleurs à travers nos failles, et ce sera plus facile su nous les assumons.

Ce qui est certain, c'est que l'enfant se construit en relation avec les autres. Il est nécessaire pour cela de prendre du temps pour être avec lui, avoir des activités communes, et lui signifier le bonheur d'être avec lui.

Annie DEAN*

*Enseignante pendant trente ans, dont neuf dans l'enseignement spécialisé (AIS), actuellement formatrice et responsable pédagogique à l'Ifamn, conférencière.

1) Propos de Philippe Mérieu, entendus lors d'une conférence donnée à Fougères, le 22 mars 2004

2) Isabelle Filliozat, Le corps messager, Éditions La Méridienne, 1988, réédité en 1998

 

 

 

 

 


Article écrit par Annie Déan.

Article paru dans le numéro 133 d’Alternatives non-violentes.